Jerome Poulalier

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Au cœur d'une communauté aussi riche et complexe que celle de l’Université Jean Moulin Lyon 3, les étudiants en situation de handicap font face à des problématiques d’accessibilité et peuvent ainsi éprouver des difficultés à trouver leur place, leurs repères, leur aisance dans leur vie étudiante. Pour autant, ces étudiants partagent les mêmes formations, aspirent à la même vie étudiante et obtiennent des réussites similaires qui méritent d'être mises en lumière.



Le projet vise à donner une voix à ces étudiants, en les interrogeant sur les challenges et réussites majeures de leur quotidien : les transports en commun, les déambulations dans les espaces commun, la bibliothèque universitaire, la gestion de l’agenda, la socialisation, la participation pendant les cours, les pratiques sportives ou artistiques.

Les sujets sont aussi variés que les typologies de handicaps sont nombreuses.

Réunissant les témoignages de 7 étudiants et de nombreux professionnels de l'Université, UNICAP est articulé autour de 4 grands thèmes : UNIVERSITÉ (Cours, accessibilité, aménagements, Pôle Handicap...) VIE ÉTUDIANTE (job étudiants, sports, culture, vie associative, sorties...) MOBILITÉ (Handicap visible & invisible, transports en commun...) et CHEZ SOI (hobbies, temps libre, gestion du temps, révisions, charge mentale...)

Hugo, 24 ans, doctorant en droit mention droit privé.

"J'ai un diabète de type 1 donc insulino-dépendant dit instable que j'ai depuis que j'ai 4 ans. Je vais parler de mon handicap, mais c'est quelque chose qu'on retrouve avec différentes pathologies, c'est... ça prend du temps. Que ce soit la pharmacie, les consultations à l'hôpital, les check-up, les prises de sang, les infirmiers, etc., il y a une vraie source de fatigue. Et ça, c'est vraiment une des choses les plus compliquées et une grosse charge mentale aussi, parce que ça prend énormément de temps. Tout prévoir, tout calculer, toujours avoir le matériel nécessaire sur soi, essayer d'anticiper comment le corps va réagir, gérer les imprévus, etc. Là, j'ai seulement ce qu'on appelle un capteur de glycémie en continu, donc il y a un petit tuyau dans mon bras qui me permet de lire sur mon téléphone en continu mon taux de glycémie. Et par chance, celui-là ne provoque pas de réactions allergiques. Donc là, j'ai deux types d'injections différentes : une injection qu'on appelle lente qui va agir sur 24 heures, que je fais une fois par jour. Et une insuline rapide, pour compenser les repas et au coup par coup, ce qu'on appelle des correctifs, lorsque il y a eu une erreur de calcul de dosage. Ce qui fait en moyenne pour moi, je pense, 7 injections par jour."

Gweltaz Guyomarc’h, Chargé de mission Handicap.

"L'idée dans l'inclusion, c'est que, à la différence de l'intégration, l'effort, il ne vient pas tant de la personne en situation de handicap, que de l'institution. Il y a une responsabilité sociale de l'institution à inclure des personnes qui présentent telle ou telle incapacité, pour qu'elles puissent mener à bien, dans notre cas, leurs études.

Par exemple, si vous me demandez directement : "Est-ce que vous êtes vous-même en situation de handicap?". Je ne saurais pas vous répondre. Concrètement, j'ai une surdité légère. À mon âge, ce n'est pas "normal" d'avoir cette baisse d'audition là, mais ça reste une baisse légère. Est-ce que ça a un impact dans ma vie de tous les jours ? Oui, mais c'est pour ça que j'ai des prothèses auditives. Est-ce que je peux faire le pas et me dire handicapé ou en situation de handicap ? Tout de suite le terme mobilise des échos, des connotations et je ne sais pas si ma situation rentre là-dedans.
Il y a une analogie que je fais très souvent : Est-ce que vous considérez que quelqu'un qui est myope est handicapé ? Après tout, ses yeux marchent moins bien que les yeux de la plupart des gens de son âge, de sa catégorie de population, etc. Mais il va avoir des lunettes. Est-ce qu'on est encore dans une situation de handicap ?
Moi je parle de situations de handicap parce que je pense vraiment que ça correspond à la notion de handicap. Que le handicap, c'est situationnel, ça dépend de la situation. Le handicap, c'est la situation qui résulte d’une interaction entre une incapacité d'une personne au niveau physique, psychique, etc, et un milieu social, technologique, culturel, etc. Et je pense que c'est très important parce que ça montre qu'il y a bien une responsabilité et un poids du milieu, de l'institution, de l'état, du politique, de la société en général vis-à-vis de la situation de handicap. "

Evan, 27 ans, étudiant en licence 2 de droit.

"J'ai ressenti le besoin de rendre visible mon handicap à travers ce fauteuil, parce qu’avant, je marchais, certes avec un déambulateur, mais je marchais quand même, donc les gens pouvaient se dire que j'allais bien. La dyspraxie, ça ne se voit pas, et les douleurs, si on ne les expriment pas, ça ne se voit pas. Et je pense que si je suis venu en fauteuil ici, c'est parce que j'avais besoin que mon handicap se voit. Parce que à vouloir tout le temps faire semblant, à courir après la normalité, on court après quelqu'un qu'on n’est pas, et on n’a pas de temps à perdre à courir après quelqu'un qu'on n'est pas. Et puis courir, moi, je ne peux pas de toute façon, donc... Il vaut mieux accepter de ne pas courir, et puis se concentrer sur ce qu'on peut faire."

Lou, 22 ans, étudiante en Diplôme

d'Accès aux Études Universitaires.


"J'ai un TSA (Troubles du Spectre Autistique) et aussi de la dyspraxie, dyslexie, dysorthographie, dyscalculie. J'ai besoin de toujours retourner dans mon monde et des fois, je peux complètement me perdre. Et puis j'ai beaucoup de mal à rester longtemps entourée de personnes. Mais par contre, quand je trouve le truc qui me plaît (apprendre le Russe), je peux rester des heures et des heuressans interruption, sans me rendre compte du temps qui passe. Donc c'est à la fois un problème et un avantage. Jusqu'à présent, c'était un problème et là, je pense que ça va être quelque chose de positif. Pour l'instant, je n'ai pas eu de note en dessous de la moyenne et je ne suis toujours pas démotivée, ça m'encourage. C'est quelque chose qui n’était jamais vraiment arrivé avant. J'ai pris de la maturité, j'ai trouvé quelque chose qui me plaît, un vrai objectif, et du coup, ça me pousse à aller plus loin, à me dépasser."

TÉMOIGNAGES EN VERSION AUDIO

De façon à rendre le contenu créé aussi accessible que possible, tous les témoignages sont disponibles en format audio via une application gratuite. Exemple ci-contre, et toutes les thématiques sont accessibles ici : Université - Chez Soi - Aménagements - Le Pôle Handicap - Mobilité - Vie Etudiante - Le MOT handicap - Baguette Magique

Ameline, 27 ans, étudiante en Master 1 Patrimoine et Musées - Muséographie


On le dit à la rigolade entre nous, mais pour être handicapé, il faut être riche. Parce qu'on a plein de trucs à acheter. Par exemple, je n'ai pas d'accessoire pour suspendre mon pommeau de douche dans la salle de bain. C'est tout bête, mais avec la fibromyalgie, par moments, je suis incapable de me brosser les cheveux ou de lever les bras pour me laver la tête. Il me faudrait une cuisine à hauteur puisque je suis petite. 

J'ai un tabouret dans ma cuisine parce que des fois, je suis tellement fatiguée que, juste pour touiller des pâtes ou faire cuire un steak, je ne peux pas tenir debout, donc j'ai besoin de m'asseoir. C'est plein de petits trucs comme ça qui font qu'on est obligé d'avoir des choses. Là, j'ai une pince dans les cheveux, pour la simple et bonne raison que pour m'attacher les cheveux, je me mets accroupie, j'appuie mes bras sur mes jambes et je bouge juste les mains pour les attacher. C'est bête, mais ça, on ne s'en rend pas compte.

Morgan, 18 ans, étudiant en licence 1 d'histoire.

"Le monde qui m'entoure c'est quelque chose qui est compliqué. Devoir exprimer les sentiments, exprimer les émotions, exprimer ce que je vis moi, c'est pas simple du tout. Mais t'aurais dû me voir il y a quelques années, c'était horrible. Je me souviens à l'époque, j'avais tellement peu d'amis, que le seul ami que j'avais, c'était un livre. C'est quelque chose qui, je pense, est caractéristique de l'autisme, il y a toujours un truc qui va être primordial. Et pour moi, ça va être l'histoire, le médiéval, la lecture, le dessin, des choses comme ça, voilà la culture en général."

PHOTO-MOTION

Ci-contre une version animée du photo-reportage pour présenter les grandes lignes du projet et quelques images supplémentaires. Venez découvrir l'exposition pour apprécier le projet dans sa globalité. Du 8 Mars au 19 Juillet 2024 à l'Université Jean Moulin Lyon 3.

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